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| Histoire du blues | |
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calbo Admin
Nombre de messages : 1671 Age : 53 Localisation : Poitiers Date d'inscription : 03/03/2007
| Sujet: Histoire du blues Ven 1 Juin - 15:51 | |
| Le blues est une forme musicale vocale et instrumentale, dérivée des chants de travail et des gospels des populations afro-américaines. C'est un style où le ou les chanteur(s) expriment leur tristesse et leurs coups durs (d'où l'expression « avoir le blues ») Le blues a eu une influence majeure sur la musique populaire américaine, puisque l'on en retrouve des traces dans le jazz, le rhythm and blues, le rock and roll, le hard rock, la musique country, la soul, les musiques pop ou de variété et même la musique classique. Le terme "blues" vient de l'abréviation de l'expression anglaise Blue devils (littéralement "démons "), qui signifie "idées ", . Cela renvoie aussi à la recherche de la note "bleue". C'est augmentée de la tonalité principale du morceau. Agrémentée d'un effet d'ajustement vers le grave, elle donne une sonorité particulière caractéristique du blues. Elle a probablement pour origine la musique africaine dans laquelle le tempérament n'existait pas et fut probablement introduite au début du blues par les esclaves noirs américains. Il faudrait vendre son âme au diable pour pouvoir jouer et trouver cette "note bleue". L'instrumentiste tente d'imiter la complainte du chanteur. L'une des plus anciennes références au blues se retrouve dans une farce de George Colman le Jeune, Blue devils, a farce in one act (1798). Plus tard, au cours du XIXe siècle, l'expression était employée comme euphémisme pour désigner le delirium tremens ou la police. L'utilisation de l'expression dans la musique noire américaine remonte au moins à 1789 à Memphis dans le Tennessee avec le morceau de William Christopher Handy, « Memphis Blues ». Dans les paroles, le mot blues traduit un état d'âme mélancolique. Les plus anciennes formes de blues provenaient du Sud des États-Unis, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Ces formes étaient le plus souvent orales, accompagnées parfois par un rythme donné par des instruments rudimentaires. C'est principalement dans les champs de coton de la région du delta du Mississippi (entre Senatobia et Clarksdale) que ces formes prennent des tours de plus en plus complexes. L'une des formes antérieures au blues est le Fife and Drums joué dans la région Hill Country du Mississippi (il s'agit d'un ensemble de percussions guidé par un fifre en bambou, instrument que jouait le maître en la matière, Othar Turner). Il y eut d'autres formes de blues avec des instruments rudimentaires (une corde fixée sur une planche). Puis le blues a évolué avec des instruments simples, tels que la guitare acoustique, le piano et l'harmonica. La légende raconte que l'un des guitaristes bluesmen, Robert Johnson, aurait signé un pacte avec le diable ce qui lui aurait permis de devenir un virtuose du blues (blue devils : c'est une musique liée aux forces maléfiques qui était fuie et rejetée par nombre de personnes aux États-Unis). W.C. Handy fut l'un des premiers musiciens à reprendre des airs de blues, à les arranger et les faire interpréter par des chanteurs avec orchestres. Il fut également l'auteur de morceaux parmi les plus célèbres, tel le fameux Saint Louis Blues. Du point de vue des textes, les premiers blues consistaient souvent à répéter un même vers deux ou trois fois, comme par exemple :Woke up this morning with the Blues down in my soul / Woke up this morning with the Blues down in my soul / My baby gone and left me, got a heart as black as coal. Les années 1920 et 1930 virent l'apparition de l'industrie du disque, et donc l'accroissement de la popularité de chanteurs et guitaristes tels que Blind Lemon Jefferson et Blind Blake qui enregistrèrent chez Paramount Records, ou Lonnie Johnson chez Okeh Records. Ces enregistrements furent connus sous le terme de race records (musique raciale), car ils étaient destinés exclusivement au public afro-américain. Mais les années 1920 connurent également des chanteuses de blues extrêmement populaires, telles que Gertrude « Ma » Rainey, Bessie Smith et Victoria Spivey. Après la Seconde Guerre mondiale, l'urbanisation croissante et l'utilisation des amplificateurs pour la guitare et l'harmonica menèrent à un blues plus électrique (tel que le Chicago Blues), avec des artistes comme Howlin' Wolf et Muddy Waters. C'est ce blues électrique qui donnera plus tard ses racines au rock and roll. Vers la fin des années 1940 et pendant les années 1950, les noirs américains ont déménagé vers les villes du nord comme Chicago et Détroit, pour y trouver du travail. Dans les villes comme Chicago, Détroit et Kansas City, un nouveau style de blues « électrique » fut crée, qui utilisait la voix, la guitare électrique, la basse électrique, la batterie et l'harmonica amplifié avec un micro et un ampli. J. T. Brown, qui jouait avec les groupes d'Elmore James et J.B. Lenoir a aussi utilisé des saxophones, mais plutôt comme des instruments d'accompagnement que des instruments solos. Le style de blues urbain de Chicago fut bien influencé par le blues du Mississippi, d'où sont venus des musiciens comme Howlin' Wolf, Muddy Waters, Willie Dixon, et Jimmy Reed. Les harmonicistes comme Little Walter et Sonny Boy Williamson (Rice Miller) étaient bien connus dans les clubs de blues à Chicago. Les autres joueurs d'harmonica, comme Big Walter Horton et Sonny Boy Williamson, avaient aussi beaucoup d'influence. Muddy Waters et Elmore James jouaient de la guitare électrique avec un « slide » ou « bottle neck » ; l'exercice consiste à jouer les notes sur le manche en posant un bout de métal ou un goulot de bouteille sur les cordes. B. B. King et Freddy King n'ont pas utilisé le « slide ». Les chanteurs Howlin' Wolf et Muddy Waters marquèrent le blues de leurs voix rauques et fortes. Le contrebassiste et compositeur Willie Dixon a eu un grand impact sur l'environnement musical de Chicago. Ses chansons comme Hoochie Coochie Man, I Just Want to Make Love to You (écrite pour Muddy Waters), Wang Dang Doodle (pour Koko Taylor), et Back Door Man (pour Howlin' Wolf) sont devenus des « standards » de blues. Plusieurs artistes de Chicago Blues enregistrent leurs disques avec Chess Records. Le style de blues urbain des années 1950 a eu un grand impact sur la musique populaire des musiciens comme Bo Diddley et Chuck Berry. Aussi, le style de blues urbain des années 1950 a influencé le style de musique de Louisiane de zydeco, surtout Clifton Chenier. Les musiciens comme T-Bone Walker (de Dallas) étaient plus associés au style de blues de la Californie, qui est plus « smooth » que le style de blues de Chicago. Les blues de John Lee Hooker étaient plus individuels que le style de blues de Chicago. À la fin des années 1950, le swamp blues s'est développé près de Baton Rouge avec des artistes comme Slim Harpo, Sam Myers et Jerry McCain. Le swamp blues était plus lent, avec un style d'harmonica moins complexe que dans le Chicago Blues. Les chansons du style les plus connues sont Scratch my Back, She's Tough et King Bee. Le jump blues était un autre développement du blues de cette période qui a influencé la musique populaire. Le jump blues était un hybride populaire du swing et du blues, mettant en vedette des chansons "up-tempo" orchestrées pour des big bands. Le musicien de ce genre qui a le plus influencé la musique populaire était Big Joe Turner, qui a enregistré la version originale de "Shake, Rattle, and Roll," Ruth Brown, et LaVern Baker ("Tweedle Dee"). Lors des années 1960, les styles de musique influencés ou créés par les noirs américains, comme le rock and roll et la soul sont devenus des styles populaires. Les musiciens blancs ont popularisé beaucoup de styles des américains noirs aux États-Unis et au Royaume-Uni. Dans les années 1960, une nouvelle génération d'enthousiastes du blues apparaît en Europe et en particulier en Angleterre. Les principaux acteurs de ce que l'on appelle alors le British Blues Boom sont les Yardbirds, les Bluesbreakers menés par John Mayall ou encore les Animals et incluent de nombreuses stars de la pop et du rock à venir Jimmy Page, Eric Clapton ou Jeff Beck (tous trois membres successivement des Yardbirds) qui intègrent à leur musique des influences psychédéliques et pop. Ces groupes de blues d'Europe et d'Angleterre ont influencé plusieurs groupes aux États-Unis, qui mélangent également le blues et le rock, comme Canned Heat, Janis Joplin, Johnny Winter, The J. Geils Band, Ry Cooder et le virtuose de la guitare électrique et inventif Jimi Hendrix. À la fin des années 1960, le style West Side Blues fut créé à Chicago avec les artistes comme Magic Sam, Magic Slim et Otis Rush. Le West Side Blues de Albert King, Buddy Guy et Luther Allison était caractérisé par une guitare électrique forte. Aux États-Unis, les guitaristes et chanteurs B.B. King, John Lee Hooker, et Muddy Waters se présentaient encore sur scène, et leurs performances ont inspiré une nouvelle génération de musiciens, comme le New-Yorkais Taj Mahal. L'ère de « Civil Rights » a augmenté l'auditoire pour les blues traditionnels, et les festivals comme le Newport Folk Festival ont programmé des prestations de « grands » comme Son House, Mississippi John Hurt, Skip James, et le Reverend Gary Davis. J.B. Lenoir a enregistré des chansons qui touchaient aux thèmes du racisme ou de la guerre du Vietnam. Les artistes des États-Unis comme Janis Joplin et Jimi Hendrix, tous influencés à la fois par le blues traditionnel et le blues électrique, firent découvrir cette musique au jeune public de l'époque. L'interprétation que les artistes de cette génération donnèrent au blues aura plus tard une influence très forte sur le développement du rock and roll. Pendant les années 1980 le blues — tant traditionnel que contemporain — a continué d'évoluer à travers le travail de Robert Cray, Bonnie Raitt, Taj Mahal, Ry Cooder, Albert Collins, Keb'Mo', Jessie Mae Hemphill, Kim Wilson et bien d'autres. Le style de blues « Texas rock-Blues » a été créé dans les années 1980, qui utilise les guitares solo et d'accompagnement en même temps. Le style Texas a été fortement influencé par le Blues-rock d'Angleterre (e.g., John Mayall). Les artistes importants du style Texas Blues étaient Stevie Ray Vaughan, The Fabulous Thunderbirds et ZZ Top. Lors des années 1980 John Lee Hooker est redevenu populaire, avec ses collaborations avec Carlos Santana, Miles Davis, Robert Cray et Bonnie Raitt. Eric Clapton (anciennement des Blues Breakers et du groupe Cream) est redevenu populaire lors des 1990s avec son album pour MTV Unplugged, où il joue des chansons traditionnelles sur une guitare acoustique. Pendant les années 1980 et 1990, les « Blues scenes » furent créés partout aux États-Unis, au Canada, et en Europe. Ces « Blues scenes » comprenaient des revues de Blues (e.g., Living Blues et Blues Revue), les sociétés de blues, des festivals de blues, et des clubs où est joué du blues. D'un point de vue technique, le blues repose sur trois éléments : un rythme souvent ternaire syncopé, l'harmonie en I-IV-V (les notes "tonales" de la tonalité, connues depuis les grecs antiques), et la mélodie qui utilise la gamme blues et les "notes bleues". Le blues a eu une influence sur une très large variété de styles musicaux, qui intégrèrent dans des proportions variables l'un ou plusieurs de ces éléments. Si l'on ne peut alors plus parler de blues on utilise fréquemment le qualificatif bluesy pour indiquer cette coloration particulière. Il est à noter par ailleurs qu'au-delà de stricts canons techniques, le blues se caractérise souvent - mais pas toujours - par une humeur teintée d'une certaine langueur ou mélancolie. Le blues repose sur un rythme ternaire syncopé. Chaque temps est donc découpé en trois croches dont on ne marque que la première et la troisième. Si le rythme peut être plus ou moins rapide, un blues est traditionnellement joué assez lentement. Le terme de shuffle indique généralement un tempo moyen. Quant au boogie, c'est en général une cadence plus appuyée. Le blues traditionnel est formé à partir d'une cadence de 3 accords, qui se répètent sur douze mesures. Dans ce cas on parle de « 12 bar Blues ». Ces accords, désignés par les chiffres romains I-IV-V, sont les premier, quatrième et cinquième de la gamme majeure correspondant à la tonalité du morceau. Les sonorités les plus communément employées sont les accords de septième. Dans ses formes un peu plus élaborées, le Blues recourt fréquemment à des accords de neuvième, voire à d’autres types d'accords. La gamme blues traditionnelle est simplement une gamme pentatonique mineure à laquelle on a ajouté une note. C'est cette dernière (la quinte diminuée) qui donne la couleur blues au morceau, d'où son nom de blue note (« note bleue »). Certains auteurs, notamment Le Roi Jones dans son livre Le Peuple Blues, avancent la théorie que ce serait là une tentative d'adaptation d'une gamme propre à la musique traditionnelle africaine. Les 5 + 1 notes de la gamme blues sont donc : T + 1,5 + 1 + 0,5 (blue note) + 0,5 + 1,5 (+ T). E.g. en Do: Do - Mib - Fa - Solb (blue note) - Sol - Sib (- Do). Si l'on parle de quinte diminuée, il ne faut pas dire Fa# mais sol bémol : do-fa# étant une quarte augmentée. Mais le son est exactement le même, c'est une enharmonie (sauf si les instruments sont accordés selon un tempérament inégal). L'autre gamme fréquemment utilisée en Blues est la pentatonique majeure. Ce n'est pas la quinte diminuée qui est la note bleue. D'ailleurs il y a deux notes bleues par mode. Ce sont la tierce mineure et la septième mineure. Pour Do : do - ré - mib - fa - sol - la - sib. La fonction harmonique reste majeure malgré ces deux intervalles mineurs et c'est ce qui donne la couleur du Blues. Si l'on joue la pentatonique majeure sur la tierce mineure on obtient effectivement ces notes bleues. Toujours pour Do : mib - fa - sol - sib - do. La quinte diminuée — en l'occurrence fa# — est une passing note mais n'est pas la note bleue. La plupart des Blues sont en modes majeurs pour l'accompagnement alors que les mélodies sont chantées sur la gamme pentatonique avec la note bleue. Il existe cependant de fameux Blues en mineur par exemple : As the Years Go Passing By par Albert King.
Dernière édition par le Ven 1 Juin - 16:03, édité 1 fois | |
| | | calbo Admin
Nombre de messages : 1671 Age : 53 Localisation : Poitiers Date d'inscription : 03/03/2007
| Sujet: Re: Histoire du blues Ven 1 Juin - 16:02 | |
| Bien que le blues puisse être interprété sur tout type d'instrument, certains sont traditionnellement plus utilisés que d'autres : la guitare : guitare acoustique pour le blues traditionnel ou, à partir des années 50 la guitare électrique, branchée à un amplificateur qui ajoute des caractéristiques tonales comme la distorsion. l'harmonica, acoustique ou utilisé avec un microphone et un amplificateur. le piano et autres instruments à clavier comme l'orgue Hammond (dès les années 1960 et 1970) ou le piano électrique (à partir des années 1970). Au sens large, le timbre est la « couleur » du son : même s'ils jouent les mêmes notes, une guitare ou un saxophone se distinguent par leur timbre. Cela est également vrai d'un être humain à l'autre. On a coutume de dire que les chanteurs classiques essaient d'imiter les instruments, alors que les instruments de blues essaient d'imiter la voix humaine (ou parfois celle de Donald Duck, d'un bombardier ou d'une mitraillette). Les bluesmen ont beaucoup exploré le timbre : ils ont notamment été les premiers, pendant les 1950, à employer des amplificateurs pour la guitare et l'harmonica. Les voix fortes et graves de chanteurs comme Howlin' Wolf et Muddy Waters jouent également beaucoup sur le timbre. La technologie et les effets de mode ont plus tard ajouté d'autres éléments au son blues, comme les guitares dirty et saturées des Rolling Stones ou d'Eric Clapton ou les effets psychédéliques employés, entre autres, par Jimi Hendrix : le feedback, la distorsion style « Fuzz », et des effets plus étranges encore comme « Rotary », constitué d'un haut-parleur en rotation. Le vibrato est un effet appliqué à une note de musique. Très employé notamment par les musiciens de blues, cet effet consiste à provoquer une variation rapide de la hauteur de la note. Comme tous les effets de nuance, le vibrato apporte une expressivité particulière selon la façon dont il est effectué : vite ou lentement, de façon fluide ou saccadée. Le vibrato est un élément essentiel du son blues, que cela soit pour les voix ou sur des instruments tels que la guitare. Pour cette dernière, divers moyens ont été utilisés depuis B. B. King, surtout les moyens mécaniques qui modifient légèrement la longueur de la corde vibrante. Plusieurs techniques existent donc, qui donnent chacune des effets sonores légèrement différents : faire vibrer les doigts de la main gauche, ou le manche de la guitare lui-même, ou encore en déplaçant le chevalet à l'aide d'un petit levier appelé tige de vibrato. À partir des années 1960, les musiciens de blues-rock utilisèrent également des moyens électroniques, comme la pédale wah-wah ou l'effet Larsen (le « feedback ») finement maîtrisé. Plus récemment, les musiciens de blues ont commencé à utiliser des techniques numériques pour créer du vibrato, comme les boîtiers programmables équipés de processeurs de traitement du signal, qui permettent de paramétrer aussi bien le timbre que l'attaque ou le vibrato. Les chansons qui relatent la vie quotidienne commencent souvent banalement. Par exemple - When I Woke up in the morning I believe I'll dust my broom (En me levant ce matin je pensais que j'allais dépoussiérer mon balai). Et ensuite, ces chansons dérapent souvent peu à peu, couplet après couplet - When I Woke up in the morning I believe my baby's gone (En me levant ce matin j'ai remarqué que ma femme est partie), et ensuite When I Woke up in the morning I believe I must go home (En me levant ce matin j'ai décidé qu'il faut que je rentre à la maison). De cette manière, l'histoire pourrait se terminer d'une manière plus sérieuse ou douloureuse. À l'origine les bluesmen étaient de braves paysans (les hill Billies, « ploucs » en français) perdus au fin fond du « delta du Mississippi », plaine cotonnière qui n'est pas le vrai delta mais plus au nord. Ils chantaient souvent des événements locaux tels que la crue du Mississippi (High Waters Blues), la construction des digues (Levee), l'incendie d'une ferme de coton. À la rigueur on parle d'une grande ville pas trop éloignée comme La Nouvelle Orléans, Memphis, Saint Louis. Mais il y a fatalement des incursions ou des espoirs de voyages dans d'autres villes des États-Unis, que ce soit pour trouver du travail, faire le service militaire ou participer aux luttes d'émancipation. Un bluesman peut donc être amené à parler de l'actualité nationale. Une anecdote montre le second degré des bluesmen et l'utilisation d'un langage propre. Dans Sweet home, Chicago, Robert Johnson rêvait d'aller « to that old California, come on in my sweet home, Chicago » ; en 1980, les Blues Brothers corrigeront cette erreur « back to that good old place, sweet home, Chicago » croyant que Johnson avait fait une erreur géographique. En fait la Californie dans l'imaginaire blues signifie pays de richesse, de la ruée vers l'or, ce que représentait Chicago à l'époque pour les bluesmen pauvres du Mississippi. Enfin l'horizon ne manquera pas de s'élargir au globe avec la participation de certains appelés à la Seconde Guerre mondiale, au mur de Berlin, à la guerre du Viêt Nam. On retrouve tout ceci dans des blues comme ceux de J.B. Lenoir. Comme beaucoup de textes poétiques le blues joue sur l'interaction entre des contraires. Les choses ne sont jamais simples en matière de poésie, le langage n'est pas univoque surtout quand l'auteur est un être humain enchaîné (ou un adolescent qui veut se libérer des parents dans le rock). Ce qui signifie qu'il faut toujours se méfier lorsqu'on lit un texte de blues, surtout nous autres francophones. Allez savoir s'il n'y a pas un message codé ! Presque toutes les phrases ont un effet rhétorique plus ou moins évident. Par exemple dans une Amérique corsetée dans le puritanisme, il serait malséant de raconter des grivoiseries ou même des choses de sexe. D'où de multiples doubles sens parfois argotiques, parfois phonétiques, souvent ingénieux. « I got my mojo working » : au premier degré, ça indique que j'ai mon mojo qui marche (un mojo est un gris-gris, une amulette porte-bonheur, c'est normal qu'un esclave superstitieux soit content que son porte-bonheur fonctionne, mais le maître s'en fiche). Mais, au second degré « j'ai mon zizi qui marche bien, tu peux venir vérifier baby». Une chanson dit « Come on baby in my kitchen » : au premier degré, ça indique que « viens chéri dans ma cuisine ». Mais cela s'interprète également : « viens chéri dans mon intimité ». Ensuite, la chanson qui dit « My long black crawling snake » : au premier degré, ça indique que le chanteur a un long serpent noir rampant. Mais aussi, il fait référence au sexe masculin du chanteur. Un autre exemple, dans la chanson qui parle des « great balls of fire » : au premier degré, ça indique que on parle de grosses boules de feu dans la description de l'incendie d'un entrepôt de coton (le maître partage cette désolation). Mais aussi, le poète a ses roubignoles en feu (le maître n'y voit rien). Mais ce n'est pas si simple, un doute finit par subsister, il y a des passages où on ne sait plus s'il y a second degré ou simple premier degré : « rock me baby, rock me all night long. Rock and roll » au premier degré, ça indique que on veut être bercé toute la nuit par sa chérie. Mais aussi, bercer et faire rouler pourrait être un référence à l'acte de faire l'amour. « Don't you see my heart on fire, burning with a strange desire? » : au premier degré, ça indique « ne vois-tu pas mon cœur en feu qui brûle d'un étrange désir ? ». Mais aussi, il pourrait indiquer peut-être qu'il y a autre chose qui est en feu ? Et pourquoi ce désir bien naturel serait-il étrange ? Il en va de même pour l'exemple donné plus haut où le poète déplore le départ de sa bien-aimée. Dans le domaine politique et social c'était encore plus délicat. Comment critiquer le maître blanc ? Comment se plaindre de son sort? Une autre interaction entre des contraires se fait entre le désespoir ou la joie. Blue, familiar (depressed) : triste, cafardeux ; to feel blue : avoir le cafard. Le mot familier Blues veut dire « cafard », « spleen » mais on ne peut pas s'en contenter. Les textes racontaient principalement la dureté de la vie et ses injustices, ce qui donna à tort au blues une réputation de musique du désespoir, alors que les paroles sont au contraire souvent joyeuses et pleines d'humour. Pour exemple, la chanson suivante montre ces émotions : Rebecca, Rebecca, get your big legs off of me, — Rebecca, Rebecca, get your big legs off of me — It may be sending you baby, but it's worrying the hell out of me. | |
| | | calbo Admin
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| Sujet: Re: Histoire du blues Ven 1 Juin - 16:02 | |
| Une autre interaction entre des contraires est celle entre le diable et dieu. On a coutume de schématiser les choses en disant que gospel et blues sont deux frères ennemis, le gospel parle de Dieu, le blues n'en parle pas. Il existe certaines légendes sulfureuses que l'on retrouve dans certains morceaux (Crossroad, Me and the Devil Blues) selon lesquelles tel ou tel guitariste aurait passé un pacte avec le Diable à minuit à la croisée des chemins : échange d'une virtuosité époustouflante contre son âme. Sont concernés par cette légende Robert Johnson, Son House, Jimi Hendrix et d'autres. Plus concrètement au départ un Bluesman (même phénomène avec les rockeurs) ne s'occupe pas de Dieu, mais souvent se crée une dynamique, sous la pression sociale — reproche de mécréantisme, voire de diabolisme fréquemment couplé avec un reproche de dépravation sexuelle — ou selon une réflexion personnelle. L'artiste peut basculer vers le gospel, définitivement ou avec des allers-retours, comme Skip James. La même bifurcation s'est manifestée à la naissance du rock, fils spirituel du Blues. Par exemple Little Richard a commencé avec des rocks ébouriffants et hurlants, sa musique a été qualifiée de diabolique ; il a interrompu sa carrière pour devenir pasteur, il fut chanteur de gospels et finalement, depuis 1964, il oscille entre la théologie et le rock and roll ! Certains auteurs ont poussé à l'extrême cette dichotomie (Dieu/pas Dieu) en la présentant comme parallèle avec l'opposition entre une philosophie de la résignation et une philosophie de la révolte. « Je vis une vie d'esclave, je ne peux rien changer mais ça ira mieux au paradis et je le chante dans mes gospels » ou bien « je vis une vie d'esclave mais ça va changer quand nous nous révolterons et je le chante dans mes Blues » ; l'auteur typique sur ce point est Le Roy Jones (Le Peuple du Blues, Folio, Gallimard, Paris, 1968 - aux USA, Blues People, 1963). Il allait jusqu'à affirmer que le Blues était l'hymne naturel des Panthères Noires (Black Panther Party). Pour en revenir à la notion de base selon laquelle le Gospel parle de Dieu et le Blues n'en parle pas, disons que le Blues ne se revendique pas athée mais plutôt laïc, bien que ce terme soit un anachronisme et un ana-géographisme. Il est « laïc », il invoque parfois le Dieu des chrétiens, il pratique parfois une religion animiste (exemples : got my mojo working, un mojo étant un grigri ou le sexe masculin en argot et I'm a Voodo chile, le vaudou étant la version importée d'Afrique). Le blues, des fois reflète d'une vie sentimentale. Dans Katie Melua, My aphrodisiac is you elle parle de celui qu'elle aime. Des fois l'amour et la haine se rattachent à la vie quotidienne d'untel. My babe just walked by, ma chérie vient juste de s'en aller. L'amour qu'on a pour une personne est important : si on perd cette personne, on l'aime toujours mais on a de la haine pour elle. L'influence du blues sur le rock and roll et ses dérivés est fondamentale, et s'est confirmée et renforcée à plusieurs époques : Tout d'abord, le rock and roll est issu du blues, mélangé à la fin des années 40 avec des musiques « blanches » comme la country. Au départ, la différence entre les deux styles est mince, à tel point que de nombreux morceaux peuvent être à la fois rattachés à chacun des deux styles : le rock des débuts est souvent un blues joué sur un tempo plus rapide et avec un rythme binaire au lieu du ternaire blues. De plus, le rock ne suit pas nécessairement la structure d'accords blues I-IV-V (voir plus haut), même si cela arrive souvent. Beaucoup de musiciens rock and roll des premiers temps, comme Ike Turner, Carl Perkins, Chuck Berry ou Elvis Presley, ont commencé par pratiquer le blues, et ont continué à le jouer tout au long de leur carrière. Dans les décennies qui ont suivi, le blues est resté une grande source d'inspiration pour les musiciens rock. Le rock and roll lui doit même en partie sa « renaissance » au début des années 60, avec le mouvement du British Blues Boom. Quasiment tous les musiciens Rock de cette époque se sont très fortement inspirés du blues, et certains, tels les Rolling Stones, Eric Clapton ou les Animals, ont même commencé par jouer exclusivement ce style, avec souvent pour seule différence avec les morceaux originaux un tempo très accéléré, une pratique connue à l'époque sous le nom de « rave-up »[3]. Ainsi, de nombreux morceaux figurant sur les albums de groupes très célèbres de l'époque sont en fait des classiques du blues quelque peu remaniés... même si les pochettes « oublient » souvent d'en mentionner les véritables auteurs ! C'est le cas notamment des Rolling Stones, avec des chansons comme Little Red Rooster, I'm a King Bee ou Love in Vain, qui, aujourd'hui encore, leur sont bien plus souvent associées qu'à ceux qui les ont écrites. Cette influence que certains, notamment parmi les mouvements d'émancipation des noirs américains, ont qualifiée de « pillage », s'est poursuivie dans les années 70 et au delà, avec de nombreux groupes à cheval sur le rock et le blues. Ainsi, le groupe de hard rock londonien Led Zeppelin a largement assis son répertoire sur le blues : leur premier album éponyme était presque exclusivement constitué de reprises de classiques du genre, bien que les membres du groupe soient cités comme auteurs de tous les morceaux ! La vérité a depuis été en partie rétablie par des procès perdus par le groupe. Au delà de la simple reprise de morceaux, le blues a eu une influence déterminante sur la manière de jouer du rock, notamment dans les années 60. Ainsi, les guitaristes de rock utilisent encore aujourd'hui très largement les techniques instrumentales et les gammes du blues dans leur jeu. La très forte expressivité de cette manière de jouer la rend en effet pertinente même dans des contextes musicaux sans aucun rapport avec le blues originel. Aujourd'hui encore, l'influence du blues est omniprésente dans le rock, parfois de manière évidente comme pour des groupes comme les White Stripes ou The Black Keys, dont il constitue une grande partie du répertoire. En France, des artistes comme Benoît Blue Boy, Patrick Verbeke, Bill Deraime ou Paul Personne incarnent avec succès une vision francophone du blues, mais bien entendu très influencée par la musique américaine. Côté instrumental, l'harmoniciste Jean-Jacques Milteau est un performer internationalement apprécié et enregistre plusieurs albums qui font référence. À la guitare, Patrick Verbeke est un spécialiste reconnu du blues, et Jean-Pierre Danel, bien que non exclusivement bluesman, démontre sa maîtrise du genre dans "Guitar Connection 2" avec le titre "NZ Girl Blues", des duos acoustiques avec Hank Marvin, ou sa reprise instrumentale de "Toute la musique que j'aime " de Johnny Hallyday. On peut voir l'influence des blues dans les chansons de Harold Arlen, de Blues in the Night; DeSylva, Brown, and Henderson, Birth of the Blues; et dans quelques chansons des The Beatles On peut voir l'influence des blues dans les chansons de Jimmie Rodgers, Hank Williams et Doc Watson. On peut voir l'influence des blues dans la musique de Maurice Ravel (sa Sonate pour violon et piano), George Gershwin (son Rhapsody in Blue, le Concerto en fa majeur, et Porgy and Bess) et dans la musique d'Arthur Honegger (Pacific 231). Le blues a également influencé le cinéma, surtout aux États-Unis. Le film Crossroads (Walter Hill) (1986) montre le mythe sulfureux du pacte avec le diable. Bande son de Ry Cooder et duel mythique entre le héros du film Ralph Macchio et Steve Vai en personne. Le fameux pacte de Robert Johnson est évoqué dans le film O'Brother, de Joel Coen. Les deux films de John Landis, Blues Brothers (1980) et Blues Brothers 2000 (1998), qui dressent un panorama de différents styles et mettant en scène une pléthore de vedettes, ont eu une importante influence sur l'image du blues.
source : wikipédia | |
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